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L’ÉGLISE FORTIFIÉE SAINT-MARTIN

L’église fortifiée Saint-Martin de MONTCORNET est, par ses spécificités, l’une des plus importantes de Thiérache. 

A son origine, ce monument, classé Monument Historique depuis 1911, construit de pierres blanches, allie les styles roman et gothique. Il a été érigé au début du 13ème siècle, vraisemblablement, par un riche ordre religieux, les Templiers, un ordre qui sera dissous par le Roi de France, Philippe le Bel, en 1314. 

Dès le 14ème siècle, l’édifice a été ouvert aux paroissiens. La Ville traversait une époque de prospérité économique liée aux activités textiles et au travail de la laine. On comptait, à MONTCORNET, 1 000 feux, soit environ 4 000 habitants. 

L’évènement majeur sera la destruction partielle de l’église due à l’incendie total de la ville le 22 avril 1574. 

Sous la Révolution, l’édifice, déchristianisé par les ordres du régime de la Terreur, devient Temple de la Raison et de l’Être Suprême (1794-1796), puis est transformé en fabrique de salpêtre et laissé à l’abandon avec, en 1802, un nouvel incendie de MONTCORNET, jusqu’aux abords de l’église. 

Deux ouragans en 1864 et 1905 arrachent les toitures de l’édifice. Entre 1914 et 1918, lieu de culte mais aussi hôpital militaire, le lieu sacré subira des pillages. En mai 1940, l’église connait de nouvelles destructions suite aux bombardements de la gare. 

L’église abrite, aujourd’hui, un mobilier d’époques différentes, fruits d’acquisitions et de dons, un orgue majestueux et de magnifiques tableaux dans le chœur. 

Les églises fortifiées de Thiérache :

Depuis l’époque gallo-romaine, et durant toutes les époques de l’Histoire de France, la Thiérache est restée une région de frontière, régulièrement soumise à des invasions armées (Guerre de Cent Ans, conflits divers ou religieux jusqu’à l’époque de Louis XIV). Dans cette contrée rurale, les habitants ont trouvé des solutions pratiques pour fortifier leurs églises. Elles deviennent, de ce fait, des lieux de refuge, pour quelques jours, en attendant le départ des assaillants vers d’autres lieux de méfaits. Ainsi, en Thiérache, quelques 65 de ces édifices ont été aménagés ou construits, dans une remarquable densité. Après l’ère gothique, de la pierre blanche calcaire, la brique s’est imposée, tirée de sols argileux, au début du 17ème siècle, pour ériger des tours et tourelles de forme ronde.

LA BATAILLE DE MONTCORNET (17 MAI 1940)

Les armées allemandes, en contournant la ligne Maginot, ont traversé la Belgique et ont attaqué la France le 10 mai 1940. 

L’avancée allemande du Général Guderian semble irrésistible mais dans l’Aisne, une contre-attaque est prévue, avec à sa tête, un colonel encore méconnu : Charles de Gaulle. 

L’armée allemande pratique une guerre de mouvement dont les attaques éclaires conjuguent blindés et aviation. L’armée française, quant à elle, n’a pas su s’engager dans la voie de la mécanisation et rares sont les officiers qui, comme Charles de Gaulle, ont compris l’importance de ces armes nouvelles. C’est la 4e Division Cuirassée de Réserve, constituée le 10 mai 1940 qui, commandée par le futur chef de la France libre, sera au cœur de cette contre-offensive. 

Le 17 mai, à 04h15, Charles de Gaulle lance ses chars sur l’axe Liesse-Montcornet. Les 49 chars légers R35, en fer de lance, se dirigent vers Montcornet, épaulés de 14 chars D2, lents et dépassés et de 17 chars lourds B1 bis. 

Des échanges de tirs, des mouvements de blindés ont lieu. Plusieurs morts sont dénombrés, comme le commandant Bescond, tué devant La Ville-aux-Bois-les-Dizy. Mais la bataille de Montcornet s’essouffle vite et les combats cessent pour recommencer, quelques jours plus tard, à Abbeville. 

Cependant, la bataille de Montcornet constitue un moment fondamental de la 2nde Guerre Mondiale. Pour la première fois, l’avancée allemande est, sinon stoppée, du moins inquiétée dans sa progression. Pour la première fois depuis 1917 et la Bataille de Berry-au-Bac, l’armée française utilise à bon escient l’arme nouvelle que sont les chars. Et pour la première fois, apparaît dans l’histoire française le nom d’un colonel visionnaire et courageux : Charles de Gaulle. Ainsi, c’est à Montcornet que débute la lente construction des armées de la France libre et que prend forme l’esprit de la Résistance Française.

LE CHAR

Monument commémoratif des combats qui se sont déroulés sur le secteur de Montcornet et ses alentours du 13 au 18 mai 1940 et notamment la contre-attaque menée par la 4ème D.C.R. du Colonel de Gaulle.

LA COLONNE DES MOBILES

Le cimetière de Montcornet possède une bien curieuse colonne de bronze encadrée par deux tours crénelées. Ce monument commémore un fait dramatique qui a marqué le canton tout entier à travers un fait hors du commun. Cet évènement s’est déroulé en septembre 1870 à Laon lorsque la poudrière explosa, faisant des centaines de victimes, tant chez l’occupant prussien que chez les prisonniers français. Des débris projetés sur tout le plateau et jusqu’au faubourg de Vaux provoquèrent de nombreuses victimes supplémentaires parmi la population. 

132 mobiles de la 7ème compagnie du canton de Rozoy-sur-Serre ont péri dans cette catastrophe qui fit la une de la presse d’outre-Rhin. 

Le Général français THEREMIN d’HAM mourra de la suite de ses blessures. Le Général de l’armée ennemie, le Duc de Mecklembourg, également atteint, survivra. 

Ce monument a été inauguré le Lundi de Pâques, le 1er avril 1872 à la suite d’un service funèbre. 

LA CATASTROPHE DE LISLET

Dans le cimetière de Montcornet se trouve une tombe où reposent des femmes et jeunes filles de Montcornet qui ont péri lors de la catastrophe de Lislet. 

Lors de la Guerre 1914-1918, Montcornet se situe non loin des champs de bataille, Reims ou le Chemin des Dames. L’occupant a installé un important centre de stockage de munitions desservi par des voies de chemins de fer sur la rive gauche du Hurtaut à la sortie du village. Cela provoque l’inquiétude des habitants d’autant plus qu’on a signalé la présence d’obus à gaz.

En mai 1918, un baraquement fait de planches de sapin recouvert de toile bitumée a été affecté à la fabrication de fusées de réglage pour l’artillerie allemande. Les autorités militaires d’occupation ont réquisitionné de forces des jeunes filles et femmes du secteur de Montcornet malgré l’opposition des maires de Montcornet et de Lislet. 

Le 14 mai 1918, vers 15h30, l’explosion tant redoutée s’est produite dans l’atelier transformant les ouvrières en torches vivantes ou d’innommables poupées calcinées suivant les témoins de l’époque. Le bilan est catastrophique : 11 victimes, 9 autres qui décèderont les jours suivants à l’issue d’atroces souffrances, 3 blessées graves qui garderont des séquelles à vie et 11 blessées plus légèrement. Des allemands et des italiens font partie de cette liste en essayant de sauver ces ouvrières de la fournaise.  

LA SUCRERIE DE MONTCORNET 

Fondée en 1866 – (Rédaction : Jean LECLERE, Historien local).

Sucrerie de betteraves fondée en 1866 par Jules Linard puis dirigée successivement par Léonce Listre (de), neveu de Jules Linard, René Listre, Jacques Listre (de père en fils).

L’établissement industriel est le premier de France à fonctionner avec un système de râperies. Dès la première campagne en 1867, la sucrerie est reliée par canalisations à la râperie de Boncourt, construite à proximité de la ferme de Saint-Acquaire.

Le dispositif est ensuite renforcé avec la création de la râperie de Montloué qui sera en activité jusqu’en 1886.

En 1976, la sucrerie est contrainte d’intégrer le groupe Sucre-Union, puis le 6 janvier 1988, la sucrerie ferme après plus 100 ans de service.

Cette usine fut le poumon économique et social de toute une région pendant plus d’un siècle. 

L’histoire du sucre commence dans la région au début du 19ème siècle. Montcornet avait déjà, semble-t-il, une fabrique de sucre autour des années 1840. En 1855, Marle inaugure sa sucrerie. À partir de 1860, on cultive la betterave à sucre partout dans l’Aisne, entre la Thiérache et la vallée de la Marne. La région de Montcornet et les Ardennes, toutes proches, voient ainsi l’installation d’unités de fabrication : Saint-Germainmont, Rethel, Tavaux, Clermont-les-Fermes apparaissent à partir de 1864. 

La région de Montcornet voit à l’époque l’arrivée d’une famille, les Linard (trois frères : Jules, Adolphe-Désiré et Nicolas-Fulgence). Toute la famille se lance dans la grande aventure du sucre à partir de 1862, dans les Ardennes, puis l’Aisne et le Nord (à Cambrai qui fut un temps la plus grande sucrerie de France).  

Une année après la fondation de la sucrerie de Montcornet, la ferme de Saint Acquaire, sur le trottoir de Boncourt, accueille la première râperie de France. Elle a pour mission d’extraire le jus sucré des betteraves produites aux alentours et d’envoyer celui-ci par des tuyaux souterrains (conduites de fonte de 100mm à emboîtement et cordon) vers la fabrique centrale de Montcornet. Pour donner la dimension de cette innovation, à la suite de Montcornet, on comptait en 1876, 59 sucreries centrales avec 143 râperies. C’est pourquoi, le système Linard a été à l’honneur à l’Exposition Universelle de Paris en 1878. 

À l’aube du 20ème siècle, à la disparition des frères Linard, la lignée poursuit sa route par les filles qui ont épousé des ingénieurs qui se sont partagés le patrimoine. De nouveaux noms apparaissent : Laborde, Péralté, Mennesson et Listre. L’entreprise connait un nouvel essor. En 1898, la sucrerie de Montcornet fait l’acquisition de sa voisine, Tavaux, qui deviendra une râperie. Une tuyauterie est installée entre les deux unités, en parcours souterrain, sur une distance de 11 km le long de la vallée de la Serre. L’entreprise voit ainsi sa capacité de production doublée (600 tonnes de betteraves par jour). 

La première Guerre Mondiale a évidemment des conséquences sur la production sucrière située en zone occupée. Les bâtiments des usines sont réquisitionnés par les allemands à des fins autres que la fabrication de sucre. Toutes les fabriques sont dépouillées de leurs machines. La cloche de bronze qui rythmait la vie de l’usine est démontée et enterrée dans la ferme de Saint-Acquaire par la famille Gérard qui la préserve ainsi de la fonderie. 

L’après-guerre permet à la sucrerie de Montcornet de repartir avec de nouvelles forces pour augmenter ses capacités de production et étendre sa zone d’influence vers le sud. Mais avec la 2nde Guerre Mondiale commence une nouvelle occupation de quatre longues années. On procède au remplacement des charpentes en bois brûlées lors des bombardements de mai 1940 par des structures métalliques plus hautes. Les allemands s’installent dans les locaux de l’entreprise. 

Après 1946, les structures de production se résument à la sucrerie de Montcornet et à une distillerie à Clermont-les-Fermes. La production journalière oscille entre 800 et 1 000 quintaux de sucre. 

Fin des années 70, Montcornet est la plus petite usine du groupe, toutefois, ses performances la placent parmi les cinq premières en France par le prix de revient à la tonne de betteraves travaillées. Des progrès remarquables ont été réalisés : la sucrerie est passée de 1 000 tonnes par jour en 1955 de capacité de râpage à 2 000 tonnes par jour en 1975 et à plus de 4 000 tonnes par jour en 1983. En 1984, près de 5 000 ha de betteraves alimentaient la sucrerie dans un rayon de dix kilomètres. 

Dans les années 80, lors de la célébration du 120ème anniversaire de l’usine, on souligne le progrès de l’entreprise depuis sa création avec des innovations constantes dans les méthodes de fabrication et de ramassage des betteraves. 

Une nouvelle décennie commence, la dernière ! Pourtant, on continue d’investir avec le projet de création d’un nouveau silo à sucre présenté lors d’une opération « Portes ouvertes » en 1982. Ce silo conçu à plat et non en hauteur ne sera jamais construit à Montcornet. Il sera inauguré à Guignicourt, deux années plus tard. En novembre 1983, la sucrerie fait travailler plus de 1 000 personnes. 

En 1987 naissent les Sucreries du Nord-Est (association de Montcornet, Guignicourt et Saint-Germainmont). 

Le 6 janvier 1988, le journal « L’Union » annonce : « La sucrerie, c’est fini ! »  Monsieur Jouvène, le directeur, précise que le rapprochement des trois sucreries n’a pas empêché le développement de menaces qui pesaient sur la production française.

Rédaction de la page « Histoire et Patrimoine » avec la participation de Jean LECLERE – Historien local.